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La musique en bandes dessinées

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Photo: Stéphan Poulin, Tourisme Montréal

Mots-clés : feux d’artifice, musique, pyrotechnie, pyromélodie

Le spectacle commence par la musique. Puis les feux explosent en cadence. Tandis que les petits et les grands s’écrient : « Wow! Encore! », un homme dans l’ombre compte les temps. Pierre Walder repasse dans sa tête l’enchaînement de la symphonie des feux qu’il a composée si longuement et si patiemment. Le concepteur pyromélodique originaire de la Suisse tend particulièrement l’oreille à l’importante synchronisation entre musique et feux, placée sous la gouverne des ordinateurs. « C’est la musique qui mène le spectacle et les feux d’artifice s’y plient », soutient Pierre Walder.

Ballet minuté de figures de lumière étincelantes, ce spectacle naît d’un art, ou d’une science, la pyrotechnie. Mais on n’enseigne pas le métier de concepteur pyromélodique, on le pratique un spectacle à la fois.

 
 
Montréal,12 juillet 2008. Le Portugal présente «Et le gagnant est...» un spectacle pyromélodique dédié au septième art.

L’acousticien céleste

À la fois mélomane averti et ingénieur de formation, Pierre Walder est professeur d’acoustique musicale au Conservatoire supérieur de musique de Genève. Doté d’une solide expérience professionnelle auprès de la Deutsche Grammophon, de la BBC et de Radio Genève, il œuvre comme conseiller auprès de la Communauté de diffusion de la musique suisse sur disques. L’infatigable acousticien travaille également comme consultant pour plusieurs salles de concert.

Comment trouve-t-il le temps de plonger dans l’art pyromélodique depuis 30 ans? « Ce n’est pas du travail de faire rêver les gens. C’est un pur plaisir », affirme Pierre Walder qui ne monte cependant qu’un spectacle ou deux par année. C’est à la demande de la Radio suisse romande qu’il s’est lancé dans cette étrange aventure musicale en 1978. Le lac de Genève a été sa première scène de spectacle.

Lorsque les grandes portes de feu se sont élevées sur les jetées de la rade de Genève, le public s’est cru transporté dans Les Mille et Une Nuits de Shéhérazade. Où se trouvait le feu? Et l’eau? « Il faut savoir tirer avantage du site. On ne conçoit pas le même spectacle à Genève qu’à Montréal. Avec l’expérience, on ajuste le tableau au lieu », précise Pierre Walder.

 

Photo: Bob Burch, L’International des Feux Loto-Québec présenté par TELUS

La musique du feu

À Montréal, la grande roue et les manèges de la Ronde ont pris part au spectacle Le Carnaval des animaux. « Tout part du thème. J’imagine un fil rouge sur lequel je construis la musique du spectacle », explique Pierre Walder.

Musique baroque, classique, populaire et jazz, le concepteur pyromélodique puise dans tous les styles de musique pour bâtir sa trame sonore. « J’ai même mis un Ave Maria, en hommage à mon ami Giovanni Panzera, l’année de sa disparition », dit-il. Ce maître italien de la pyrotechnie, qui a donné aux feux de Montréal ses lettres de noblesse, a initié Pierre Walder à cet art.

Pour construire une première trame musicale de trois à quatre heures, il lui faudra écouter de 200 à 300 pièces. Un montage de 60 minutes sera présenté aux artificiers pour construire un canevas sonore de près de 40 titres; soit 30 minutes de spectacle. Sur le papier, la musique démarre doucement, les premières chandelles s’élèvent du sol et prennent de l’amplitude. Un rythme plus cadencé provoque le lancer d’étoiles et de gerbes jusqu’à l’accord final composé de bombes pour un bouquet final étincelant et sonore. « C’est comme un repas, on a d’abord les hors-d’œuvre, puis les différents mets jusqu’au dessert inoubliable », décrit Pierre Walder.

 
 
Spectacle présenté par Apogée, une entreprise montréalaise qui a remporté le Bouquet d’Or 2006 lors des Nuits de Feu au domaine de Chantilly, en France.

Trente minutes de magie

Explosions, crépitements, sifflements, comment entendre la musique lors d’un spectacle si assourdissant? L’équipe va sélectionner les explosifs les moins bruyants et réaliser un important travail de sonorisation. « On intègre les craquements et des respirations. La musique est généralement très rythmée et supporte bien les feux », explique Pierre Walder.

Lorsqu’on prend le ciel pour écran, il faut savoir composer avec certaines surprises comme l’humidité, la mauvaise température et les anomalies. Pour la grande finale de l’International des Feux montréalais Loto-Québec 2008, les percussions étaient à l’honneur avec le spectacle Sans tambour, ni trompettes, mais les cieux n’ont guère été favorables. « C'est un de mes plus mauvais spectacles. Il y avait pourtant de nouvelles couleurs et une excellente synchronisation des 24 tableaux musicaux », soupire l’artiste. Peu importe ce qui se passe, la symphonie des feux appartient à l’instant, sans répétition ni reprise.

Ce spectacle éphémère laisse pourtant une profonde empreinte chez ceux qui le regardent ou le font. Pierre Walder a ainsi monté un spectacle sur le très connu Boléro de Ravel. Une expérience qu’il a partagée avec le célèbre artificier italien Giovanni Panzera, son ancien complice. « Ce fut notre plus grand succès et le moins facile à réaliser. Imaginez 17 fois le même roulement de tambour et une musique lancinante se déployant autour de thèmes identiques. Il a fallu rendre le même effet visuellement avec des chandelles qui changent de forme et de couleur pour suivre le timbre, jusqu’à la finale grandiose », raconte le pyromélodiste. Ce ballet de lumière a ainsi tenu en haleine des milliers de spectateurs. Et certains lui en reparlent encore...


Isabelle Burgun
Collaboration spéciale